Auteur: Karl D’haveloose

Quand ce n'est pas dans le cadre d'un salon, c'est dans les médias spécialisés de certains secteurs (dont le nôtre) que l'on n'arrête pas d'évoquer le retard pris par les entreprises manufacturières belges dans le domaine de l'automatisation. À mon humble avis, on a déjà suffisamment écrit et débattu sur ce sujet. On commence toutefois à entrevoir la lumière au bout du tunnel, et ce même en Europe. De plus en plus de petites entreprises sont en effet en train de réaliser une analyse de rentabilité en vue de robotiser leur production dans des conditions abordables. Et elles ont bien raison de le faire, car en fin de compte, le but de l'automatisation et de la numérisation est aussi de rendre les petites entreprises manufacturières compétitives par rapport aux entreprises de plus grande envergure.

Les fournisseurs de robots sont en train d'adapter de manière toujours plus rapide et créative leur politique de prix à l'égard des petits fabricants afin de mettre la main sur une partie du marché. Les robots, la programmation et le modèle commercial des robots en tant que service sont de plus en plus abordables. Selon ARK Invest, par exemple, le prix d'un robot qui était encore de 44.000 dollars en 2011 avait déjà chuté à 23.000 dollars en 2022. Et la société américaine de gestion de placements prévoit que le prix de ce même robot chutera encore de 60 % d'ici à 2025. Si ça ce n'est pas de la déflation…

À l'heure actuelle, ce sont les petits fabricants qui constituent le marché qui connaît la croissance la plus rapide dans le domaine de la robotique industrielle, car ils ont grand besoin de nouveaux systèmes robotiques collaboratifs. Le marché mondial des robots industriels devrait connaître un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 9,39 %. On estime que la valeur totale de ce marché atteindra 30,5 milliards de dollars d'ici à 2030. Le segment des robots collaboratifs, qui sont essentiels pour les petits fabricants en raison de leur flexibilité et de leur capacité d'adaptation, enregistre quant à lui un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 14,7 %. En 2022, ce segment avait généré un chiffre d'affaires de 715 millions de dollars, qui devrait croître pour atteindre 2,1 milliards de dollars d'ici à 2030.

Un plan plus vaste pour résoudre les problèmes de concurrence, de productivité et de pénurie de main-d'œuvre

Pour relever les défis et améliorer l'optimisation de la robotique, le passage à la robotique présente des avantages pour une petite entreprise manufacturière pour les raisons suivantes :

La pénurie de main-d'œuvre, la fluctuation de la disponibilité, le coût des matériaux et les normes de qualité de plus en plus strictes imposées par les clients obligent les petits fabricants à automatiser un plus grand nombre d'activités dans leurs ateliers. Avec la pénurie de main-d'œuvre dans les régions où les travailleurs du secteur de la production sont rares, la robotique est en plein essor dans les petites entreprises manufacturières. L'article récemment publié dans la revue Harvard Business Review, intitulé 'A New Generation of Robots Can Help Small Manufacturers', note que "le secteur manufacturier, en particulier, rencontre d'énormes difficultés à recruter et à retenir les travailleurs. Plus de 2 millions d'emplois dans le secteur manufacturier resteront vacants aux États-Unis d'ici la fin de la décennie, et les trois quarts des entreprises européennes peinent déjà à recruter des travailleurs adéquats. Les ateliers cherchent donc désespérément des talents et sont confrontés à une baisse de la productivité et à une rotation du personnel qui ne peut être maintenue."

Des améliorations des performances mesurables qui viennent étayer l'argumentaire en faveur de la robotique

Chez les petits fabricants, la robotique permet d'obtenir des résultats tout à fait mesurables à grande échelle. Lors de la réalisation d'une analyse de rentabilité en vue de l'adoption de la robotique, tous les coûts et avantages associés doivent être pris en compte. Voici donc quelques-uns des nombreux avantages mesurables que la robotique peut aujourd'hui apporter aux petites entreprises manufacturières. La réduction des coûts de maintenance de 10 à 40 %, l'augmentation de la productivité de 3 à 5 % et la réduction du délai de mise sur le marché des nouveaux produits de 20 à 50 % sont quelques-uns des résultats mesurables obtenus grâce à la robotique. Les économies s'étendent au contrôle de la qualité et à la gestion des stocks, avec des réductions respectives de 10 à 20 % et de 20 à 50 %. L'automatisation du travail intellectuel peut en outre entraîner une augmentation de la productivité de 45 à 55 % pour les professionnels techniques.

Comment les petits fabricants réalisent une analyse de rentabilité en faveur de la robotique

L'automatisation des processus les plus fastidieux de la production visant à réduire les coûts et à améliorer la qualité est l'objectif que de nombreuses entreprises poursuivent initialement lorsqu'elles adoptent la robotique. Commencez donc à petite échelle en vous concentrant sur ce qui consomme de l'argent et du temps, car c'est ainsi que l'automatisation par la robotique permet d'obtenir les gains les plus importants.

Définissez une stratégie de mise en œuvre de la robotique dans tout votre atelier, de manière à obtenir des résultats mesurables à grande échelle. Il est essentiel de savoir si l'investissement dans un système robotique peut être rentabilisé et de suivre l'évolution des coûts nécessaires pour pouvoir étayer et défendre l'analyse de rentabilité des projets d'automatisation ultérieurs.

Voici les étapes que les petits fabricants doivent suivre lorsqu'ils réalisent une analyse de rentabilité en faveur de la robotique :

• Identifiez les goulets d'étranglement. La première étape consiste à identifier les tâches du processus de production qui prennent le plus de temps et nécessitent le plus de main-d'œuvre. C'est en effet là que l'automatisation peut offrir les plus grands avantages. Les points problématiques sont notamment les perturbations de la chaîne d'approvisionnement, les pénuries de personnel, la conformité aux réglementations en vigueur, les processus inefficaces ou les problèmes de productivité.
  
  
• Évaluez les différentes solutions possibles. Une fois les points problématiques identifiés, il convient d'évaluer les différentes solutions robotiques disponibles. Les fabricants créent souvent des tableaux comparatifs dans Google Sheets ou Excel, permettant de comparer les coûts, la facilité de mise en œuvre et le retour sur investissement potentiel.
  
  
• Calculez le retour sur investissement (RSI) de la solution robotique proposée. Il faut pour cela notamment déterminer le coût initial du robot, les coûts d'exploitation, les économies de main-d'œuvre, l'augmentation de la productivité et les éventuels avantages fiscaux. Le RSI est généralement calculé sur une période de 5 à 10 ans, sachant qu'un robot industriel peut être utilisé pendant une durée moyenne de 15 ans.
  
  
• Réalisez des essais pilotes initiaux. Menez un projet pilote à petite échelle pour tester l'efficacité de la solution robotique choisie. Cela permet aux fabricants d'évaluer les avantages et de cerner les difficultés de l'automatisation dans la pratique.
  
  
• Mesurez et partagez les résultats avec les équipes de production. Suivez les performances du projet pilote en vous concentrant sur des paramètres clés tels que la productivité, la qualité et la réduction des coûts. Ces données sont essentielles pour réaliser une analyse de rentabilité convaincante.
  
  
• Passez à l'échelle de l'ensemble de l'atelier. Si le projet pilote s'avère concluant, planifiez une mise en œuvre à grande échelle. Tenez compte des ressources nécessaires, du calendrier et de l'impact potentiel sur l'ensemble des opérations.
  
  
• Procédez à des évaluations et à des ajustements. Analysez en permanence les performances des systèmes robotiques et procédez aux ajustements nécessaires. Cela permet de s'assurer que la stratégie d'automatisation reste efficace à tout moment et qu'elle continue d'apporter de la valeur.