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ARTISANAL 4.0 : Ici, l'innovation va au-delà de la simple survie – next bakery is not a piece of cake

24-01-2023

 

 

 

 

À l'heure où la majorité des boulangers d'Europe occidentale mettent la clé sous le paillasson ou survivent tant bien que mal en attendant de pouvoir prendre leur retraite bien méritée, Panerex investit 5 millions d'euros dans de nouvelles infrastructures, des machines dernier cri et des concepts de cuisson et de boutiques tout à fait contemporains. Au même moment, les prix des matériaux et de l'énergie amputent gravement les faibles marges restantes. Nous dégustons un délicieux cappuccino bien crémeux en compagnie de Philip Fastré, CEO de Panerex, dans ses locaux de Maasmechelen.

 

 

Panerex est une boulangerie ultramoderne, implantée juste en face du parking de Maasmechelen Village, qui génère un chiffre d'affaires de 5 millions d'euros grâce à ses 5 boutiques et ses 135 employés, pour un équivalent de 50 temps pleins. "Les boulangeries industrielles sont souvent une sorte de boîte noire totalement anonyme nichée au fond d'une zone industrielle", philosophe Philip. "Nous avons choisi de dévoiler notre procédé de cuisson à tous ceux qui visitent notre bâtiment et notre boutique, et plus particulièrement aux consommateurs eux-mêmes."

 

Fastré voit le monde de la boulangerie complètement bouleversé : "L'automatisation est pour nous une véritable nécessité, car la boulangerie traditionnelle (90 heures/semaine) est un travail d'esclave. Aujourd'hui, plus personne ne veut faire cela. Tout ce qui est répétitif, rébarbatif ou lourd est géré par des machines, de sorte que le boulanger lui-même peut laisser libre cours à sa créativité et à ses compétences, et ce dans le plus grand respect des règles de l'art."

 

Les acquisitions classiques et le rachat de parts de marché ne sont pas une solution

 

"Au début des années 2000, c'était cela notre première idée", confesse l'entrepreneur. "Racheter des boulangeries pour les convertir en points froids, et en même temps augmenter la capacité de notre propre boulangerie. Nos produits étant plus chers, une guerre des prix a inévitablement éclaté au niveau local. Nous sommes rapidement arrivés à la conclusion que nous devions créer une marque Panerex, un concept de boutique et une histoire à partir de rien. Concrètement, cela impliquait la démolition des boutiques que nous avions acquises et la construction de nouveaux bâtiments offrant une histoire, une marque et une mission cohérentes."

"Tout ce que l'on touche ne se transforme pas en or par magie. L'investissement que nous avons récemment réalisé à Diepenbeek s'élève à 600.000 euros. Et il faudra compter au moins 3 années de dur labeur avant de pouvoir espérer un quelconque retour sur investissement."

 

Bake… wait & see

 

Fastré poursuit son récit avec ardeur : "Nous sommes là avec un produit cher, un facteur d'expérience, mais aussi des machines et des ingrédients coûteux. Dans ce contexte, une croissance n'est pas chose évidente. On constate que la classe moyenne est en train de disparaître un peu partout, et que les consommateurs se tournent soit vers les produits les moins chers, soit vers les produits les plus chers. Et c'est justement dans ce dernier segment que nous évoluons. Les boulangeries industrielles et les supermarchés jouent sur le segment promo. De notre côté, nous nous adressons à ceux qui sont à la recherche d'une valeur ajoutée."

 

En 2018, nous avons accueilli environ 1.000 clients dans nos 2 boutiques de Maasmechelen (40.000 habitants) les jours de forte affluence. À raison d'une moyenne de 4 personnes par famille, cela représente un total de 4.000 consommateurs. Soit une part de marché de 10 %", affirme le fondateur de Panerex.

 

 

"There's no such thing as a free lunch", poursuit l'entrepreneur. "Lorsque mon frère et moi avons entrepris des démarches auprès des quatre grandes banques pour obtenir l'investissement de 5 millions dont nous avions besoin pour ce complexe, beaucoup se sont moqués de nous. Les grandes boulangeries sont en effet des investissements à haut risque. Au final, c'est 'une banque et demie' qui a accepté de faire affaire avec nous. Heureusement, la Société de reconversion du Limbourg est elle aussi intervenue à hauteur de 600.000 euros. Mais le plus beau dans toute cette histoire, c'est que nous sommes parvenus à rembourser l'intégralité de cette somme au bout de seulement deux ans."

 

No crisis to waste

"Il est clair que nous sommes déjà dans une période de récession, à laquelle s'ajoutent une pénurie de ressources, une crise énergétique et un marché du travail extrêmement serré. Pour nous, il s'agit du moment idéal pour rentabiliser tous les investissements que nous avons réalisés au niveau de l'automatisation, de la réduction de la consommation d'énergie et de la neutralité climatique. Par ailleurs, le degré élevé d'automatisation et d'innovation nous permet d'employer un aspirant boulanger avec plus de facilité. Même les personnes aux capacités limitées et les groupes défavorisés peuvent trouver un travail intéressant chez nous", assure Fastré.

 

En ce qui concerne la production, mon interlocuteur a noté que les volumes restent inchangés, mais en ce qui concerne les marges, la situation sera nettement plus difficile dans le contexte actuel, en particulier pour les petits boulangers et les boulangers industriels. "Nous attendons avec impatience de pouvoir atteindre deux horizons. Le premier est celui du dépassement de la moitié de nos engagements financiers. Le deuxième est celui d'un marché du pain qui n'est pas vraiment en hausse, mais dont l'offre dans notre créneau se resserre, et Panerex comblera de toute évidence cette lacune."

 

The fully automated Bakery of Things

Tous nos lourds investissements dans l'automatisation, les critères ESG et la numérisation commencent à porter leurs fruits dans les périodes particulières que nous vivons actuellement.

 

Philip est très pertinent lorsqu'il explique que la fabrication du pain est bien plus qu'un simple artisanat. "Faire du pain est en effet une science exacte. En tant que boulanger, vous n'ajoutez pas une pincée de sel à votre pain. Non, vous ajoutez exactement 1,7 % de sel calculé sur le total des ingrédients secs. Vous ne devez pas non plus ajouter environ la moitié d'eau à votre farine. Non, vous ajoutez 56 % d'eau – et pas 55 ou 57 % – à un type de farine bien précis, dont la teneur en protéines est elle aussi tout à fait spécifique, en prévision d'un certain processus de pétrissage dont vous connaissez la quantité d'énergie de pétrissage qu'il entraînera et en fonction du traitement ultérieur de la pâte. J'ai littéralement grandi près des fourneaux et j'ai donc pu constater que mon père et mon grand-père travaillaient souvent en utilisant des recettes qu'ils suivaient de très près sans vraiment savoir pourquoi. Il s'agissait d'artisans tout à fait remarquables, que je respecte par conséquent encore aujourd'hui, mais ils n'avaient qu'une compréhension limitée des différents processus biologiques et chimiques qui font d'un pain ce qu'il est. Toutes ces connaissances, combinées aux technologies modernes, nous permettent aujourd'hui de fabriquer d'excellents produits d'une qualité constante."

 

 

"Les balances automatisées, qui sont reliées à des ordinateurs utilisés pour la gestion des recettes, permettent de peser les matières premières avec une précision exceptionnelle. Des capteurs mesurent les températures des matières premières, puis commencent à doser l'eau en fonction de l'échauffement prévu pour chaque type de pâte pendant le pétrissage. Le résultat final est une pâte parfaite, qui peut ensuite être transformée de la manière la plus intensive possible."

 

 

"Sur le plan logiciel, nous ne nous sommes pas fiés aux plateformes standardisées, car elles ne sont tout simplement pas en mesure de fournir un produit final suffisamment satisfaisant. Pour une grande boulangerie industrielle qui produit un pain en 4 heures ou même moins, tout ne se déroule pas de manière aussi rigoureuse, mais nous prenons jusqu'à 24 heures, ce qui donne à la moindre erreur au début du processus trop de temps pour devenir un véritable problème et donc aboutir à un produit de qualité inférieure. D'autres boulangeries sont soit trop petites pour investir dans ce type d'automatisation, soit tellement grandes qu'elles distribuent à des consommateurs ordinaires, dont les exigences sont moins élevées."

 

 

Critères ESG et efficacité énergétique – un hobby rentable

 

La technique est pour moi une sorte de hobby (ce qui explique sans doute aussi l'approche assez technique que j'ai de ma profession). Lorsque nous avons installé tous ces imposants groupes frigorifiques, j'ai aussi rapidement compris qu'il était possible de récupérer beaucoup d'énergie. Et en fait, cela n'a rien de très compliqué. D'ordinaire, lorsque l'on utilise un refroidisseur ou un four, on perd une grande quantité de chaleur. Après tout, le principe de la réfrigération consiste à extraire la chaleur d'un espace donné pour la restituer ailleurs. Ainsi, les gaz chauds provenant des compresseurs frigorifiques sont généralement refroidis par des condenseurs installés sur un toit, qui rejettent ensuite la chaleur dans l'atmosphère. Et il en va de même pour les fours, dont la chaleur est évacuée par une cheminée.

 

Entre les tuyaux de gaz chauds du système de refroidissement et sur les cheminées, j'ai fait installer des échangeurs de chaleur. Dès que ceux-ci détectent la présence de chaleur, l'eau est pompée dans ces échangeurs, qui ne rejettent pas la chaleur à l'extérieur mais bien dans de grands réservoirs tampons. La chaleur contenue dans ces réservoirs est ensuite réutilisée pour produire de l'eau chaude sanitaire ou de la chaleur pour le plancher chauffant. L'approche initiale consistait à considérer qu'il s'agissait plutôt d'un gadget qui pourrait éventuellement apporter un certain avantage mais qui, d'un point de vue purement économique, ne rapporterait probablement pas grand-chose. Encore une fois, le problème avec les calculs que vous faites en amont est que différents ingénieurs proposent des interprétations et des méthodes de calcul différentes, qui sont généralement très éloignées les unes des autres. J'ai toutefois décidé de faire cet investissement, allant ainsi à l'encontre de l'avis général. Le résultat est que nous sommes aujourd'hui 100 % autonomes sur ce plan, tout au long de l'année, grâce à la chaleur ainsi récupérée. Mon hobby qui semblait si coûteux au départ a donc fini par devenir rentable.

 

 

Il y a également une récupération d'énergie similaire au niveau de la ventilation du bâtiment. Combinée au plancher chauffant qui nous permet de chauffer à basse température, nous jouissons d'un environnement de travail particulièrement agréable. Ici, on n'a pas d'air chaud qui nous est soufflé dans le cou pour garder la chaleur, ni d'air froid glacial pour la ventilation. Dans la plupart des boulangeries et autres environnements industriels, la situation est très différente.

 

En 2019, on considérait encore qu'il ne s'agissait que de gadgets technologiques superflus et coûteux, mais je suppose qu'il est inutile de vous préciser à quel point tout cela est rentable en période d'explosion des prix de l'énergie !

 

Chaque boulanger possède sa propre centrale biomasse

Dans les mois à venir, Panerex disposera de sa propre centrale biomasse de 150 K. Chaque jour, l'entreprise produit 200 kilos de déchets organiques, ce qui devrait permettre d'économiser 75 % de la consommation quotidienne de gaz. "Ce raisonnement n'est peut-être que de la simple théorie, mais même si cette mesure ne permettait d'économiser que 25 % du prix du gaz, elle resterait un choix tout à fait logique au vu des prix actuels du gaz. Nous entrons dans une ère où les investissements durables ne sont plus un luxe ni du vulgaire greenwashing, étant donné qu'au bout du compte, ils apportent un réel avantage financier", conclut Fastré.

 

Panerex 2030

 

"Pour l'avenir, nous envisageons déjà d'ouvrir d'autres points de vente aux particuliers, car nous disposons encore d'un potentiel de production supplémentaire suffisant pour cela. De plus, notre concept de café est sur le point de devenir rentable, ce qui permet de renforcer la synergie entre nos différentes activités. Dans ce dernier segment, nous entendons également nous retrouver dans la ligue des champions", pense le boulanger à voix haute.

 

"Il y a d'autres concepts auxquels nous ne devons pas avoir peur de nous frotter, ou d'autres encore que nous devons absolument éviter. Nous pourrions très bien nous mettre à vendre de délicieux sandwichs, mais cela n'est pas toujours en adéquation avec notre portefeuille exclusif. En revanche, il existe certainement d'autres produits de niche et haut de gamme qui peuvent parfaitement être intégrés à notre concept. Nous restons donc vigilants. Un de nos rêves est aussi de pouvoir passer outre la frontière, car nous sommes très proches des Pays-Bas. Mais pour l'instant, nous allons d'abord consolider nos acquis, et ainsi voir quelles sont nos forces, nos faiblesses et nos opportunités", conclut Philip.

 

Philip Fastré – Un fan de trance tolérant qui joue régulièrement dans la cour des grands

 

Cet homme de 51 ans est un fan de Lenny Kravitz et de Neil Young, mais il peut aussi secrètement se laisser transporter par un bon morceau de trance pendant qu'il file sur l'Autobahn en pleine nuit. Il est en outre passionné depuis toujours par les belles pièces d'horlogerie vintage comme celles de la marque Panerai. De Panerai à Panerex, il n'y a finalement que peu de distance. Sur le plan gastronomique, Fastré est un végétarien 'soft'. Cela ne l'empêche d'ailleurs pas de se faire plaisir en réservant une table dans un restaurant gastronomique étoilé comme De Kristalijn à Genk. Ses choix en matière de vin restent toutefois quelque peu immatures, avoue-t-il, puisqu'il n'hésite pas à boire un Sauternes doux avec n'importe quel plat. En dehors de cela, ses plus grandes passions sont son premier petit-enfant et son entreprise.

 

En tant qu'entrepreneur, il se considère lui-même comme étant excessivement flexible. Il opte pour l'anarchie contrôlée, en partant du principe que le succès ne peut être au rendez-vous que si l'on recrute les bons employés qui adhèrent totalement à ce type d'organisation. Sa devise est 'stepping so far out of your comfort zone, that you forget how to get back' (sortir de sa zone de confort au point d'oublier comment y retourner). Fastré n'a rien eu pour rien, et le fait de sortir de sa zone de confort est son cheval de bataille qui lui permet de jouer dans la cour des grands. Il s'est récemment retrouvé face à lui-même lorsque, après une grave blessure au dos, il a dû se serrer à mort dans un corset au quotidien, tout en négociant avec les banques et en continuant à respirer le positivisme dans son entourage professionnel. Pour lui, la zone de confort du moment est toujours un siège temporaire, dont il faut à chaque fois se relever, dans l'inlassable jeu de chaises musicales de l'entrepreneuriat.

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